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Contexte

Dès le début du confinement le 16 mars, l’Ugict-CGT a souhaité réaliser un état des lieux de la situation professionnelle des cadres et professions intermédiaires et plus généralement des salarié·es. Les services de la statistique publique n’avaient alors pas proposé de dispositif particulier en dehors des remontées administratives et faisaient face à l’impossibilité pratique de faire appel aux personnels enquêteurs de l’INSEE. L’Ugict a donc sollicité les syndicalistes CGT de la Drees et de la Dares, membres également du collectif “Des chiffres et des luttes”, pour construire une enquête anonyme, respectant le mieux possible les canons internationaux de rigueur méthodologique et scientifique : l’enquête “TrEpid”.

Objectifs

Comment a été décidée l’affectation des salarié.es au télétravail, au travail en présentiel ou au chômage technique ? Comment ont évolué les conditions de travail ? Quelles mesures de protection des salarié·es ont été mises en place ? Les revenus ont-ils diminué ? A quelles difficultés font face les télétravailleur-ses ? Les représentants du personnel sont-ils écoutés par les employeurs ? Pour répondre à toutes ces questions, la CGT a donc développé un dispositif d’enquête capable de prendre en compte la diversité des situations professionnelles.

Les réponses servent à fournir des indicateurs quantitatifs qui permettent de comparer les salarié·es selon leurs caractéristiques socio-professionnelles. Sans prétention à l’exhaustivité ou à la représentativité parfaite, l’enquête a néanmoins recueilli 34 000 réponses issues de milieux professionnels très divers, dont 25 000 exploitables pour étudier la situation des travailleurs français. Ses résultats ont pour but d’alimenter le débat public et de fournir des éléments aux décideurs, aux organisations syndicales et aux salarié·es dans leurs administrations et entreprises respectives.

Gestion et passation

Le questionnaire a été élaboré par des militant·es syndicaux et des statisticiennes et statisticiens travaillant au ministère des affaires sociales, experts dans les thématiques abordées. Le questionnaire a été ensuite diffusé par les réseaux syndicaux de l’Ugict et de la CGT. Il a ainsi été administré dans de nombreuses entreprises et administrations auprès de l’ensemble des salariés. Enfin, il a été relayé dans différents médias (voir la revue de presse sur https://luttevirale.fr/presse-mai/)

Thèmes du questionnaire

Le questionnaire balaie plusieurs thèmes. Après une série de questions visant à mieux cerner le profil des répondants, le questionnaire aborde leur situation depuis le début du confinement. Pour les personnes en emploi (la majorité des répondants), le questionnaire prend alors des voies différentes selon que la personne se rend toujours sur son lieu de travail, qu’elle télétravaille ou bien qu’elle a été placée en chômage partiel ou licenciée.

Pour un certain nombre de personnes que l’on peut imaginer suffisamment informées sur la situation de leur établissement (syndicalistes, encadrants…), le questionnaire contient enfin des questions sur la situation générale de leur entreprise, au-delà de leur propre situation personnelle.

Dans la mesure du possible, les questions proviennent ou ont été adaptées à partir d’enquêtes de la statistique publique, portant le “label de qualité statistique et d’intérêt général” décerné par le comité national de l’information statistique (Cnis). D’autres questions ont été rédigées pour répondre aux questions soulevées par le contexte particulier de la crise sanitaire.

Modalités de l’enquête

  • Champs de l’enquête : population active et population inactive pour certains items, France entière.
  • Période de collecte : du lundi 6 avril au lundi 27 avril 2020 (3 semaines).
  • Mode de collecte : exclusivement en ligne (un questionnaire en français et une traduction en anglais).
  • Passation : la durée de réponse du questionnaire varie de 2 à 18 minutes selon la situation, pour une moyenne de 10 minutes.

Conformité à la réglementation en vigueur  : Les modalités de collecte et de traitement en ligne ont été précisées afin de garantir le strict respect de la réglementation nationale (RGPD) en matière de traitement informatisé, de confidentialité et de conservation des données recueillies (voir sur : https://luttevirale.fr/enquete/modalites/).

Biais de la méthodologie : En l’absence des moyens de collecte réservés aux enquêtes de la statistique publique, il nous a été impossible de se baser sur un échantillon aléatoire. L’échantillon comporte donc des biais dans la sélection des répondants, dont les caractéristiques moyennes ne correspondent pas à celles de l’ensemble de la population.

Tout d’abord, les sympathisants CGT ont par construction, eu une probabilité plus grande d’être informée de l’existence de l’enquête, et donc d’y répondre. Cet effet se traduit par exemple par le fait que, sur l’ensemble des répondants, le taux de syndicalisation est de  49 %, alors que l’enquête CT-RPS mesurait un taux de 11 % en 2016 (Dares-DGAFP-Drees-Insee), et de 19 % dans la fonction publique.

Une autre distorsion est liée à l’accès à la connexion par internet et à la disponibilité des répondants. Comme dans toutes les enquêtes par questionnaire en ligne, la population répondante ne peut évidemment pas être totalement représentative de la population française alors même qu’une partie de la population n’a pas d’accès à Internet ou alors une utilisation moindre des canaux de diffusion de l’enquête. L’Insee estime ainsi par exemple que 12 % de la population française n’a pas d’accès Internet à domicile, une part qui varie avec l’âge et le niveau de diplôme (Bernard et al, “Conditions de vie des ménages en période de confinement”, Insee Focus, 21 avril 2020).

Par ailleurs, la situation actuelle, causée par la crise sanitaire, accentue cet effet de sélection : les personnels soignants, particulièrement mobilisés, ont ainsi proportionnellement moins répondu à cette enquête, alors qu’au contraire les cadres, ou les télétravailleurs, sont sur-représentés (58 % des répondants sont en télétravail, avant redressement, alors qu’on estime plutôt cette proportion à 25 % environ sur la population française).

Méthode de redressement et correction des biais

Si les biais dans la structure des répondants est indéniable, ses conséquences sont limitées pour plusieurs raisons. Tout d’abord, des méthodes de redressement de l’échantillon obtenu ont été mises en œuvre, pour que, sur un certain nombre de variables mesurables, la structure s’approche de celle de la population française : la répartition par genre, catégorie socio-professionnelle, type d’employeur et syndicalisation a ainsi été corrigée par application d’une méthode dite de calage sur marges (voir Sautory, O. (1993), « La macro Calmar. Redressement d’un échantillon par calage sur marges », Document de travail F9310 de la DSDS, Insee).

La méthode de redressement de l’échantillon nécessite cependant de s’appuyer sur des variables observables, ou au moins sur lesquelles l’enquête permet d’avoir une information suffisamment solide ; l’enquête peut donc être dite représentative sur les caractéristiques contrôlées.

Tableau 1 : Structure avant et après calage sur marges de l’échantillon des répondants à l’enquête TrEpid

Caractéristique étudiée Dans l’échantillon brut Dans l’échantillon pondéré
Part de femmes 57 % 50 %
Part d’ouvriers  44 %  47 %
Part de cadres 26 %  28 %
Part de salariés du privé 47 %  68 %
Part de salariés de la fonction publique  49 %  24 %
Part de syndiqué-es 49 %  12 %

Enquête TrEpid (Ugict-CGT, CGT-Dares, CGT-Drees) ; calculs CGT-Dares et CGT-Drees

Champ : personnes en emploi, France

 

Ne disposant pas par ailleurs de statistiques précises sur la situation actuelle des travailleurs (présentiel, télétravail, chômage partiel…), il n’est pas possible d’effectuer de redressements sur ces aspects. La surreprésentation des télétravailleurs est donc toujours présente dans les données redressées. Dès lors, les analyses ont plutôt intérêt à privilégier des analyses séparées par situation de travail, sans tenter de décrire l’ensemble de la population.

Notons par ailleurs que les questions abordées dans l’enquête sont dans leur majorité des questions factuelles plutôt que des questions d’opinion. En effet, dans la mesure du possible, les évaluations et les jugements des répondants ont été mis de côté pour qu’ils décrivent objectivement leur situation, et en cela les réponses ont moins de raisons de varier selon le positionnement politique. On observe d’ailleurs que sur les questions factuelles, les réponses aux questions diffèrent assez peu selon que le répondant est syndiqué ou non.

Les résultats de cette enquête sont comparables aux chiffres qui proviennent d’autres source, notamment à l’enquête Acemo-Flash, menée par la Dares, qui est à ce jour la source la plus fiable sur cette thématique. (Cette enquête s’adresse aux entreprises de 10 salariés ou plus, dans le secteur privé non-agricole, excluant de fait également les particuliers employeurs.)

Les indicateurs calculés sur cette population dans l’enquête TrEpid sont assez proches des résultats de la Dares : au sein des différents secteurs par exemple, les parts de travailleurs sur site ou en télétravail sont proches (tableau 2). Ainsi, on peut voir que les biais de l’enquête sont limités et que ses résultats correspondent à ceux observés dans une enquête classique de la statistique publique.

Sur d’autres aspects, comme sur les risques encourus par les salariés, des écarts significatifs existent entre Acemo-flash et TrEpid. Néanmoins, ces écarts sont largement explicables par le mode d’obtention des informations : Acemo interroge les employeurs, alors que les salariés sont interrogés directement dans l’enquête présentée ici.

Un document d’études de la Dares présente justement les écarts de perception entre ces deux populations sur ces indicateurs, à partir de l’exploitation des volets “Employeurs” et “Salariés” des enquêtes “Conditions de travail” (Desjonquères, 2019, “ L’exposition aux risques du travail : quels écarts de perception entre les salariés et leurs employeurs ? ”, Document d’Études 2019-230).

En période de crise sanitaire, il n’est pas exclu que ces écarts soient encore plus forts qu’à l’ordinaire. Donner une place à la vision des travailleurs sur leurs conditions de travail semble essentiel.

 

 

Tableau 2 : Comparaison sur quelques indicateurs des résultats de l’enquête Acemo-flash (Dares) et TrEpid (Ugict-CGT)

Acemo flash (Dares) TrEpid (Ugict-CGT)
Part des salariés travaillant sur site ou sur chantier 27 % 21 %
            dont secteur de la construction 11 % 13 %
Part des salariés en télétravail 25 % 54 %
            dont industries extractives, énergie 30 % 36 %
Part des salariés en chômage partiel 25 % 15 %
            dont secteur des transports 20 % 23 %
Part des salariés dont la charge de travail ou le temps de travail a diminué du fait de la baisse de la demande ou de problèmes imprévus*. 85 % 80 %

 

Sources : enquête flash Acemo (Dares, collecte du 1er au 10 avril 2020), enquête TrEpid Ugict-CGT et CGT-ministères sociaux

Champ : salariés du privé (entreprises de plus de 10 salariés pour Acemo-flash ; il n’est pas possible d’utiliser la taille d’entreprise dans l’enquête TrEpid).

Remarque : les deux enquêtes ne mesurent pas cet indicateur de la même façon : Acemo-flash interroge des entreprises sur leur activité, tandis que l’enquête TrEpid interroge directement les salariés sur leur temps et leur charge de travail.

En comparant enfin avec les résultats d’autres sondages menés par des instituts privés, les résultats sont assez proches également.

Une enquête menée par Odoxa entre le 25 et le 30 mars 2020 affirmait ainsi qu’un salarié sur quatre a peur de perdre son emploi à cause de la crise sanitaire ; au mois d’avril, l’enquête TrEpid donne un niveau de 32 % pour le même indicateur. Quant au sentiment de “boule au ventre” que 43 % des travailleurs qui se rendent toujours à leur lieu de travail éprouvent à la crainte d’attraper le coronavirus (TrEpid), il se rapproche des 30 % qui répondent avoir “tout à fait” peur d’être contaminés (41 % supplémentaires ont “un peu” cette peur) selon l’étude Odoxa.

Les résultats obtenus par cette enquête ne sont donc pas contradictoires par rapport aux résultats d’autres enquêtes menées depuis le début du confinement, et apportent un point de référence sur de nombreuses questions que ces études n’avaient pas abordées.

En bref

En conclusion, les précautions à prendre pour lire les résultats produits peuvent être résumés de la façon suivant :

  • La structure des répondants peut induire de légers biais, à cause de la sélection non-aléatoire des personnes interrogées, qui peuvent donc ne pas être représentatives de la population française.
  • Des méthodes statistiques ont été employées pour redresser l’échantillon en fonction des caractéristiques observables de ces individus (âge, genre, statut d’emploi, statut, syndicalisme…), et l’échantillon obtenu peut donc être considéré comme représentatif de la population française sur la plupart des aspects.
  • Les biais de la collecte n’ont cependant pas pu être corrigés concernant la répartition des situations actuelles des travailleurs (télétravail, travail en présentiel, chômage partiel). Concernant cet aspect, l’enquête est donc représentative sur chacune de ces populations séparément, mais pas sur la population entière.

 

 

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