Sur quoi se base l’appréciation d’un danger grave et imminent dans la fonction publique ?

Danger grave et imminent pour la santé d’un·e salarié·e

La notion de danger grave et imminent doit être entendue comme étant une menace directe pour la vie ou la santé d’un·e fonctionnaire ou d’un·e agent·e, c’est-à-dire une situation de fait pouvant provoquer un dommage à l’intégrité physique ou à la santé de la personne.

L’appréciation se fait au cas par cas. En cas de suspicion d’abus dans l’exercice du droit de retrait, le litige pourra être tranché a posteriori par le juge administratif. Ainsi l’exercice du droit de retrait se fait sous le contrôle du juge administratif et non sous le contrôle de l’administration.

Mais l’on peut d’ores et déjà dire que la jurisprudence administrative en matière d’exercice du droit de retrait est particulièrement restrictive sur les deux conditions cumulatives de gravité et d’imminence du danger, tellement restrictive que certains auteurs doutent de l’effectivité de ce droit pour les agent·es du secteur public.

 

Le danger en cause doit donc être grave. Selon la direction générale du travail du 25 mars 1993 reprise dans la note DGAFP de mars 2020 (droit de retrait dans la fonction publique), un danger grave est « un danger susceptible de produire un accident ou une maladie entraînant la mort ou paraissant devoir entraîner une incapacité permanente ou temporaire prolongée ». La gravité a donc des conséquences définitives ou en tout cas longues à effacer et importantes, au-delà d’un simple inconfort.

Le caractère imminent du danger se caractérise par le fait que le danger est « susceptible de se réaliser brutalement dans un délai rapproché. L’imminence du danger suppose qu’il ne se soit pas encore réalisé mais qu’il soit susceptible de se concrétiser dans un bref délai » (DGAFP et DGT).

Ainsi, il a été jugé que l’admission dans un établissement hospitalier de malades porteurs du VIH ou de l’hépatite virale B ne présentait pas, par elle-même, le caractère d’un danger grave et imminent justifiant un droit de retrait dès lors qu’un tel établissement, en raison même de sa mission, doit être apte à faire face aux risques de contagion pour ses agent·es et pour les tiers (CAA Versailles 2 juin 1994, Hadjab et autres c./ AP-HP). Ce précédent jurisprudentiel pourrait être rapproché de la situation actuelle de covid-19.

Sur le Covid19 : Une position gouvernementale contestable

Pour le gouvernement, les possibilités de recours au droit de retrait sont « fortement limitées » lorsque l’employeur prend les mesures de prévention et de protection recommandées par le gouvernement. Dès lors qu’un employeur suit les recommandations du gouvernement, l’agent·e ne pourrait a priori pas invoquer le droit de retrait.

Cette position du gouvernement est à prendre avec prudence. D’abord, le droit de retrait est un droit garanti par des dispositions législatives et mis en œuvre sous le contrôle du juge administratif pour la fonction publique. Ce n’est pas au gouvernement ni à la DGAFP de le définir, ni même de dire si son exercice est légitime ou pas.

De plus, quand on sait les nombreux services dans lesquels les consignes ne sont absolument pas respectées et les agent·es mis·es en danger, notamment par un manque de protection pour le personnel soignant, il est indéniable que la question de l’exercice du droit de retrait doit être posée !

C’est d’ailleurs ce sur quoi la DGAFP insiste dans ses notes « le fait que l’employeur public ne mette pas en œuvre les recommandations du gouvernement peut ouvrir la voie au droit de retrait » ou à tout le moins la DGAFP met en garde l’employeur d’être irréprochable sur la mise en application des consignes : refus de télétravail alors qu’il est possible, pas de protection mise en place en cas d’accueil du public, absence d’affichage des gestes barrières, absence de nettoyage adéquat des locaux etc.

 

En période de pandémie, les personnels qui sont exposés au risque de contamination du virus du fait de la nature de leur activité habituelle ou parce que leur maintien en poste s’impose pour éviter toute mise en danger d’autrui (personnels de santé ; personnels chargés du ramassage et du traitement des déchets par exemple), ne semblent pas pouvoir exercer leur droit de retrait, au seul motif d’une exposition au virus à l’origine de la pandémie. Il faut alors démontrer la négligence et les carences de l’employeur public (masques, consignes d’hygiène, mesures d’organisation, suivi médical etc.).

Ensuite, soulignons que le « danger » peut être caractérisé par une cause extérieure à l’agent·e (ex. : locaux dangereux), mais peut aussi très bien être lié à son état de santé. Ainsi, un·e agent·e vulnérable au coronavirus (à qui on a refusé le télétravail ou la mise en autorisation d’absence) pourrait mettre en œuvre son droit de retrait plus facilement.

Enfin notons que le droit de retrait concerne la situation du ou de la salarié·e. Le fait qu’il ou elle vive avec une personne particulièrement vulnérable au coronavirus ne suffit malheureusement pas en soi à invoquer le droit de retrait.

Des questions ?

Cherchez par expression ou mot-clé

Search
Exact matches only
Search in title
Search in content
Filter by Custom Post Type
FAQ